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La signature électronique à l’épreuve du droit Marocain JABIR Hamza - - منشورات موقع الباحث القانوني


 

La signature électronique à l’épreuve du droit

Marocain

JABIR Hamza

Résumé :

Le développement technologique et l’utilisation généralisée des médias numériques ont conduit à l’émergence de la signature électronique, qui est considéré comme un ensemble de signes, symboles, lettres ou caractéristiques biométriques étroitement lié à l’acte juridique sur laquelle est opposé, ainsi qu’elle permet d’identifier son propriétaire en fonction des différents mécanismes de création de la signature électronique.

Le législateur marocain à l’instar d’autres législateurs, a réglementé la signature électronique à travers la loi 53-05 modifié récemment par la loi 43-20 en reconnaissant sa force probante. C’est dans cette optique que cet article fait l’analyse de la problématique de la valeur juridique de la signature électronique en matière de preuve des transactions électroniques.

 Mots clés : signature électronique, certificat électronique, force probante de la signature électronique.

Abstract:

Technological development and the widespread use of digital media have led to the emergence of the electronic signature, which is considered as a set of signs, symbols, letters or biometric characteristics closely related to the legal act being opposed, as well as allowing its owner to be identified according to the different mechanisms for creating the electronic signature.

Moroccan legislator, like other legislators, have regulated electronic signatures through Law 53-05, recently amended by Law 43-20, recognizing their probative value. It is with this in mind that this article analyses the issue of the legal value of the electronic signature as proof of electronic transactions.

Keywords: electronic signature, electronic certificate, probative value of the electronic signature

ملخص:    

ان التطورات التكنولوجية وشيوع استعمال الوسائط الالكترونية، أدى الى ظهور التوقيع الالكتروني الذي يعتبر جملة من الإشارات او الرموز او الحروف والسمات البيو متروية، مرتبطة ارتباطا وثيقا بالتصرف القانوني وتسمح بتميز صاحبها وتحديد هويته، وبناء على اختلاف اليات انشاء التوقيع الالكتروني تختلف صوره واشكاله. بحيث تؤدي جميع هذه الصور وظائف مشتركة تتمثل أساسا في تحديد هوية الموقع والتوقيع والتعبير عن ارادته في ابرام التصرف الالكتروني.

فالمشرع المغربي على غرار باقي التشريعات قام بتنظيم التوقيع الالكتروني من خلال الاعتراف بها تشريعيا وتبيان مدى حجيتها في الاثبات.

Introduction.

Au cours des dernières décennies, le monde a connu un développement économique et social énorme et par voie de conséquence, les entreprises, les banques, les institutions font face du jour à jour à une grande quantité de documents et une variété de contrats qui se conclut sur Internet et par voie électronique. Face à cette situation, il a fallu que les autorités mettent en place des mesures d’adaptation du droit aux nouvelles technologies qui ne feront que favoriser le développement du commerce électronique et protéger les utilisateurs.

Avec l’avènement des nouvelles technologies, l’utilisation des moyens électroniques qui ne dépendent pas de documents papier, comme un moyen de transmission de l’information entre les parties contractantes, ainsi que le recours à l’échange électronique des données et d’information sont devenus accrus.

La reconnaissance de la valeur juridique de l’écrit électronique et son équivalence avec l’écrit papier constitue l’un des moyens de sécurisation, de preuve. Dans cette perspective, afin d’instaurer la confiance entre les utilisateurs, une nouvelle forme de signature a émergé, il s’agit de la signature électronique. Compte tenu de l’importance de cette dernière en matière de preuve des transactions électroniques, la plupart des législateurs sont mobilisés afin d’encadrer les différents aspects de cette nouvelle forme de signature. Par ailleurs, l’usage de la signature électronique s’est développé de façon progressive et connaît une accélération ces dernières années, renforcée récemment par la crise sanitaire.

A l’origine, la signature électronique a été développé par les techniciens pour assurer la confiance et la sécurité. Aujourd’hui elle a essaimé dans presque tous les pays du monde, imposant sa reconnaissance dans les systèmes juridiques actuellement en vigueur. Depuis plusieurs années, les organisations internationales se préoccupent de la reconnaissance et de la validité de document et de la signature par voie électronique à travers des lois-type sur le commerce électronique et les signatures électroniques adoptées par la CNUDCI.

 En effet, la signature électronique a une grande importante pour les personnes physiques et morales qui cherchent à entrer dans le domaine du commerce électronique, leurs permettant d’entrer dans le domaine de la concurrence nationale comme internationale. Cela ne peut être attient qu’en suivent l’évolution du monde du commerce électronique, en concluant des contrats électroniques signés par une signature électronique reconnu juridiquement.

Le développement historique de la signature électronique et les phases qu’elle a traversé nous poussent à étudier à la lumière de droit Marocain, la valeur juridique et la force probante de la signature électronique en matière de preuve des transactions électroniques ?

Le traitement de cette problématique relative à la valeur juridique de la signature électronique se fera en deux volets, en commençant par le système juridique de la signature électronique (section I) et par la suite la force probante de la signature électronique (Section II).

 

Section I : Le système juridique de la signature électronique en droit Marocain.

Pour que le document soit une preuve suffisante, il doit inclure la signature de celui dont il émane, afin d’attribuer ce qui a été écrit dans le document au signataire. Le signature manuscrite ou électronique, consiste en général un moyen par lequel les parties expriment leurs volontés de s’engager. Et cela peut se produire par une signature, empreinte digitale ou empreinte de tampon.

La signature électronique est très largement reconnue et utilisée dans plusieurs pays tels que les pays européens, la France, l'Allemagne, l’Italie et les pays arabes, tel que le Maroc, l’Algérie, la Tunisie, l’Egypte (A). Toutefois, elle peut revêtir différentes formes et avoir plusieurs niveaux (B).

A.    Définition de la signature électronique

     Historiquement, la signature remonte à l’époque romaine. Elle a été créée avec le développement de l’écriture, car à l’époque, l’écriture sur papier était la plus répandue. En revanche, le développement des nouvelles technologies a fait entrer la signature dans une nouvelle phase : le numérique.

La signature électronique peut être définie comme étant « un symbole apposé à un document par une personne et permettant d’identifier cette personne et ainsi d’attester qu’elle a consenti à l’acte ou qu’elle l’a rédigé[1] »

La doctrine a défini la signature électronique en se basant sur la manière de sa création22 comme « l’utilisation des équations algorithmiques asymétriques traitées par l’ordinateur qui produisent une forme spécifique indiquant l’identité du signataire [2] ». Il l’a défini aussi comme « un ensemble de procédures techniques qui permettant d’identifier la personne dont il émane ces procédures et son acceptation de contenu de l’acte signé ».

En autre, il s’agit d’une signature qui se fonde sur un ensemble de méthodes et procédures suivies au moyen de symboles, chiffres pour produire un message électronique comportant des signes distinctifs du signataire et crypté par l’une des méthodes de cryptage.

Sur le plan international, la CNUDCI à travers l’article 2 de la loi-type sur les signatures électroniques, prévoit que le terme « signature électronique » désigne des données sous forme électronique contenues dans un message de données ou jointes ou logiquement associés audit message, pouvant être utilisé pour identifier le signataire dans le cadre du message de donnés et indiquer qu’il approuve l’information qui s’est contenue[3] »

En Europe, la signature électronique a été introduite par la directive du 13 décembre 1999 qui a obligé les Etats à la transposer dans leurs législations internes. Cette directive définit la signature électronique comme étant « une donnée sous forme électronique, qui jointe ou liée logiquement à d’autres données électroniques et qui sert de méthode d’authentification [4]». Cette directive est abrogée par le Règlement n°910/2014 du parlement européen et du conseil du 24 juillet 2014 sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur. Ledit règlement fait la différence entre trois niveaux de signature électronique. Le premier niveau appelé « Signature électronique simple » défini comme des données sous formes électroniques, qui sont jointes ou associés logiquement à d’autres données sous forme électronique et que le signataire utilisé pour signer. Le deuxième niveau, est nommée « Signature électronique avancée » qui est considéré comme une « signature électronique qui satisfait aux exigences énoncées à l’article 26 ». Le troisième niveau est la « signature électronique qualifié », créée à l’aide d’un dispositif de création de signature électronique, et qui repose sur un certificat qualifié de signature électronique.

Force est de constater que, le règlement européen comme la loi-type de la CNUDCI a basée sur l’approche fonctionnelle pour encadrer la signature électronique, c’est-à-dire qu’elle d’abord définit les fonctions de la signature dans sa forme traditionnelle ou sur papier et par la suite la transposer dans l’environnement numérique.  

En effet, la signature électronique était définie également par plusieurs législations nationales. Par exemple, le législateur Égyptienne l’a défini comme « ce qui est mis sur un document électronique portant la forme de lettres ou de chiffres ou de symboles ou de signes ou d’autres et ne pas avoir un caractère unique permettant l’identification du signataire et le distingue des autres[5] ». Le législateur algérien quant ail, prévoit que la signature électronique consiste en « une donnée sous forme électronique, joint ou liée logiquement à d’autres données électroniquement servent de méthode d’authentification[6] ». Le même article ajoute que le signataire « Est toute personne physique qui détient des données de création de signature électronique agissant pour son propre compte ou pour celui de la personne physique ou morale qu’elle représente »

En France, c’est la loi n° 230 /2000 qui a donné une définition à la signature. L’article 1316-4 de code civil définit la signature comme étant « nécessaire à la perfection d’un acte juridique pour identifier celui qui l’appose. Elle manifeste le consentement des parties aux obligations qui découlent de cet acte. Quand elle est apposée par un officier public, elle confère l’authenticité à l’acte. Lorsqu’elle est électronique, elle consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat[7] »

Revenant au législateur Marocain qui n’a pas défini la signature électronique contrairement à la plupart des législateurs arabes. Ce dernier a déterminé seulement dans la loi 53-05 en quoi consiste le dispositif de la création de la signature électronique. Il s’agit d’un matériel et ou un logiciel destiné à mettre en application des données de création de signature électronique, comportant les éléments distinctifs caractérisant le signature, tels que la clé cryptographique privée, utilisée par lui pour créer une signature électronique[8].  Cette carence législative est corrigée par le législateur dans la loi n° 43-20 relatif aux services de confiance dans les transactions électroniques[9]. En s’inspirant de règlement européen, le législateur Marocain distingue entre trois niveaux de signature électronique. Conformément à l’article 4 de la loi 43-20, la signature électronique peut être simple, avancée ou qualifié. 

      Il est important de noter, qu’au Maroc, l’Agence National de Réglementation des télécommunications (ANRT) a choisi Barid eSign comme plateforme nationale de production de certificats électroniques. L’ANRT a délivré de même un certificat de conformité à Gemalto Classic TPC IM CC pour la carte à puce TPC, qui est une carte à puce destinée aux applications basées sur la cryptographie à clé publique. 

B /- Les formes et techniques de la signature électronique

Le terme « signature électronique » désigne une notion générique qu’englobant divers mécanismes techniques méritant d’être tenus pour des signatures dans la mesure où permettent, à ceux seuls ou en combinaison, de réaliser certains fonctions essentielles (l’identification de l’auteur de l’acte, manifestation du consentement au contenu de l’acte). Il s’agit aussi d’un ensemble de données de façon indissociable à l’acte qu’en garantie l’intégrité, elle assure la sécurisation technique et juridique des échanges électroniques[10]. Cependant, la signature électronique peut prendre plusieurs formes, elle peut être sous forme d’une : Signature biométrique, le stylo de la signature électronique, enfin la signature numérique.

        La signature biométrique :

Ce type de signature se base sur l’utilisation des caractéristiques physiques, naturelles et comportementales de la personne, qui se diversifie automatiquement d’un individu à un autre. Parmi les procédés utilisés, on peut citer, l’examen des empreintes digitales[11], la rétinoscopie[12], la géométrie de la main[13] et la reconnaissance vocale ou encore la reconnaissance dynamique de la signature.  

La signature biométrique est pour remplir une fonction d’identification pour certains sites internet protégés et à des boîtes personnelles en ligne. Les procédés de celle-ci permettent d’identifier l’auteur de la signature et rattachent celui-ci au contenu de l’acte. Force est de constater, que l’utilisation de ce type de signature pour la conclusion des contrats électroniques se heurte à plusieurs obstacles pratiques : d’une part, le coût élevé de leur implémentation et d’autres part, le fait que certains caractères physiques peuvent être sujet de variations (la voix, l’influence de stress pour l’analyse de la dynamique de la signature).

De plus, même si ce type de signature remplit la fonction de l’identification du signataire comme on vient de voir, elle ne garantit pas l’expression correcte de son consentement.

        Le stylo de la signature électronique :

Il fait partie aussi des formes de la signature électronique, le stylo de la signature électronique qu’on peut utiliser dans la conclusion des transactions électroniques. Dans ce cas, la signature se produise par une simple écriture sur l’écran de l’ordinateur en utilisant un programme déterminé capable de recevoir la signature et d’en vérifier l’authenticité, elle est utilisée le plus souvent pour effectuer des paiements électroniques[14].

Ce type de signature offre des avantages indéniables pour sa flexibilité et sa facilité d’utilisation. Mais il lui a été reproché, qu'il a besoin d’un ordinateur avec des spécifications particulières qui lui permettent d’accomplir sa tâche de capturer la signature de son écran et de vérifier la conformité de la signature avec celle qui est enregistrée dans sa mémoire. Il a également besoin d’une autorité d’authentification[15].

        La signature numérique ou digitale :

La signature numérique, appelée aussi la signature digitale, « Digital signature » en anglais. Elle est présente dans plusieurs systèmes juridiques et repose sur la technique de la cryptographie, selon un procédé de création particulier. La norme ISO 7498-2 relative à l’architecture de sécurité pour les systèmes ouverts définit la signature numérique comme « des données ajoutées à une unité de données, ou transformation cryptographique d’une unité de donnees permettant à un à un destinataire de prouver la source et l’intégrité de cette unité en la protégeant contre la contrefaçon »

Quant à la CNUDCI, l’a défini comme étant « une valeur numérique apposée à un message électronique et qui, grâce à une procédure mathématique bien connue associée à la clé cryptographique privée de l’expéditeur, permet de déterminer que cette valeur numérique a été créée à partir de la clé cryptographique privée de l’expéditeur, […] les procédures mathématiques utilisées pour créer les signatures numériques […] sont basées sur le chiffrement de la clef publique. Appliquées à un message de données, ces procédures mathématiques opèrent une transformation du message de telle sorte qu’une personne disposant du message initial et de la clef publique de l’expéditeur peut déterminer avec exactitude : a) - si la transformation a été opérée à l’aide de la clé privée correspondant à celle de l’expéditeur ; b) - si le message initial a été altéré une fois la transformation opérée[16] » 

La signature numérique repose comme on l'a déjà mentionné sur la technique de la cryptographie. Cette dernière vise à garantir la confidentialité des échanges et d’assurer l’intégrité des données. La première fonction appelé « chiffrement » est généralement réalisé à l’aide de produits qui pour la plupart, sont fondés sur le Data Encryption Standard (DES), il s’agit d’un système cryptographique à clé unique utilisé par l’émetteur et le récepteur, utilisant un algorithme qui, chiffre et déchiffre un message à l’aide d’une seule clé[17].

Grace au développement de la cryptographie asymétrique, appelé aussi « cryptographie à clé publique » qui se fonde sur l’existence de deux ensembles de clés, le problème de partage des clés a été résolu. Car dans cette dernière, chaque partie dispose d’un couple de clés complémentaires, nommés respectivement, la clé publique et la clé privée. Les deux clés sont liées entre elles par une formule mathématique précise. Dans ce système, le processus de chiffrement est irréversible, c’est-à-dire que la clé utilisée pour chiffrer le message ne peut servir à le déchiffrer après. Le procédé de cryptographique asymétrique fonctionne comme suit : la signature est créée en utilisant la clé privée du signataire et tous ses partenaires peuvent vérifier sa signature en utilisant sa clé publique. Le message est chiffré par son auteur à l’aide de sa clé privée qui est le seul à connaître, puis il est expédié au destinataire. Ce dernier vérifie la signature en utilisant la clé publique du signataire. Seule la clé publique est susceptible de déchiffrer la signature émise. 

Pour un auteur, la signature numérique « apporte la sécurité technique de la transformation du message, puisqu’elle en assure l’intégrité et l’identification, mais elle n’equivant pas à la signature électronique visée par le législateur qui assure la sécurité juridique du message, en garantissant le consentement aux obligations contenues dans l’acte[18] » 

Signalons que, l’utilisation de la signature électronique dont toutes ses formes est développée durant les dernières années. Cette utilisation est renforcée récemment avec la crise sanitaire imposée par le Covid-19. Le confinement a obligé ainsi les entreprises à recourir à la signature électronique pour sceller des accords avec leur personnel et clients. Le secteur bancaire, l’assurance et l’immobilier ont été parmi les premiers secteurs à adopter la signature électronique.

Section II - la valeur juridique de la signature électronique en droit Marocain.

La signature électronique est de plus en plus utilisée dans le monde entier. Mais pour qu’elle soit fiable, doit satisfaire à un certain nombre de conditions (a) qui lui permettent d’avoir une valeur probante similaire à celui de la signature manuelle (b).

A) - Conditions de fiabilité de la signature électronique

La signature électronique n’utilise pas les mêmes principes que la signature manuelle, sans que cela n’empêche celle-ci d’assurer les mêmes rôles et d’être aussi fiable que cette dernière. Tout d’abord, la signature doit être propre au signataire, c’est-à-dire que c’est la signature qui permet d’identifier son propriétaire et qui détermine sa capacité pour conclure l’acte juridique et son adhésion à son contenu.

La signature électronique doit également être créée par des moyens que le signataire puisse garder sous son contrôle exclusif. Cette exigence assure que seul le signataire qui détient et conserve la maîtrise des moyens de signature, soit pour les utiliser lui-même, soit pour éventuellement les faire utiliser par d’autres sous sa responsabilité. Cette condition est satisfaite dans la signature numérique dans laquelle l’auteur de signature chiffre le message avec sa clé privée qui est le seul à connaître et sur lequel il détient un contrôle exclusif.

Enfin, la signature doit garantir un lien avec l’acte auquel elle s’attache de sorte que toute modification ultérieure dudit acte soit détectable. Autrement dit, le procédé de la signature doit détecter toute modification de l’acte signée. Dans la signature numérique, deux clés sont utilisées, une clé pour chiffrer le message et l’autre pour déchiffrer la signature émise avec la clé privée. Et donc, il n’y a pas de doute que toute modification du document électronique sera détectée[19].

Le législateur Marocain prévoit ces exigences dans l’article 6 de la loi 53-05, modifié par l’article 5 de la loi 43-20. Cette dernière prévoit que « la signature électronique avancée est une signature électronique simple qui doit satisfait aux exigences suivantes :

-         Être propre au signataire

-         Permettre d’identifier le signataire

-         Avoir été créée à l’aide de données de création de signature électronique que le signataire peut, avec un niveau de confiance élevé, utiliser sous son contrôle exclusif

-         Être réalisée sur la base d’un certificat électronique qualifié

-         Être liée aux données associées à cette signature de telle sorte que toute modification ultérieure des données soit détectable.

En droit français, ces conditions sont prévues par le législateur français dans l’article 1367 qui énonce que « la signature électronique devra répondre aux exigences suivantes : être propre au signataire, être créée par des moyens que le signataire puisse garder son contrôle exclusif et garantir avec l’acte auquel elle s’attache un lien tel que toute modification     ultérieure de l’acte soit détectable »

En revanche, la jurisprudence française a mis en valeur ces exigences dans un arrêt de la cour de cassation du 6 avril 2016, dans lequel la cour a affirmé que « dès lors qu’une partie dénie être l’auteur d’un écrit sous forme électronique, le juge est tenu de vérifier les conditions de validité de la signature c’est-à-dire que celle-ci consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache et, ainsi, que ce procédé mette bien en œuvre une signature électronique sécurisée, établie grâce à un dispositif sécurisée de création de signature électronique et que la vérification de cette signature repose sur l’utilisation d’un certificat électronique qualifié [20]»

Il en résulte de cet arrêt, que les juges de fonds sont tenus lorsque la signature électronique est contestée, de vérifier les conditions de validité de celle-ci en s’appuyant sur ses fonctions. Cela veut dire qu'ils doivent vérifier que la signature permet d’identifier le signataire, ainsi que si l’intégrité de l’acte a été préservée au cours des échanges. Il faut s’assurer qu’elle procède d’un dispositif sécurisé de création de signature électronique qualifié[21].

D’un point de vue technique, la croissance des activités de commerce électronique et les besoins imminents de sécurisation de l’internet ont entraîné un fort développement de la cryptographie. La technique de la cryptographie asymétrique qui se fonde sur des algorithmes de chiffrage asymétrique et repose sur une double clé (clé privée et clé publique), semble la plus appropriée pour remplir la fonction d’identification et pour assurer le lien entre la signature et l’acte. La signature électronique permet à l’aide d’un procédé cryptographique de garantir : l’identité du signataire, l’intégrité du document signé et la non-répudiation par le signataire du document signé.

        B) - La force probante de la signature électronique

Avec l’essor imposant qu’a connu le commerce électronique dans les dernières années au niveau mondial, il était capital d’intervenir législativement pour réaffirmer la confiance entre les différents acteurs de ce domaine. Certes, cela ne pourrait s’opérer qu’à travers la reconnaissance d’une valeur probatoire à la signature électronique qui constitue la voûte de la sécurisation juridique des transactions électroniques.

v Au niveau International

Sur le plan international, La CNUDCI a adopté en 1997 une loi-type sur le commerce électronique et au guide pour sur incorporation. Cette dernière vise d’offrir aux législations nationales un ensemble de règles internationales qui va leur permettre de surmonter un certain nombre d’obstacles et de créer un environnement numérique sécurisé.

L’article 7 de cette loi-type a déterminé les conditions nécessaires qui doivent comporter une signature électronique pour avoir une valeur juridique. Il s’agit de l’utilisation d’une méthode pour identifier la personne en question « signataire » et pour indiquer qu’elle approuve l’information contenue dans le message de données. En plus, la fiabilité de cette méthode doit être suffisante au regard de l’objet pour lequel le message des données a été créé ou communiqué, compte de toutes les circonstances, y compris de tout accord en la matière. 

Mais avec, la loi- type du 2001 sur les signatures électroniques, l’article 7 a été modifié. L’article 6 de cette loi dispose ainsi que « lorsque la loi exige la signature électronique d’une certaine personne, cette exigence est satisfaite dans le cas d’un message de données s’il est fait usage d’une signature électronique dont la fiabilité est suffisante, au regard de l’objet pour lequel le message de données a été créé ou communiquée, compte tenu de toutes les circonstances, y compris toute convention en la matière.

Une signature électronique est considérée fiable en ce qu’elle satisfait à l’exigence indiquée au paragraphe 1 :

1-    Les données afférentes à la création de signature sont, dans le contexte dans lequel elles sont utilisés, liées exclusivement au signataire.

2-    Les données afférentes à la création de la signature étaient, au moment de la signature, sous le contrôle exclusif du signataire.

3-    Toute modification apportée à la signature électronique après le moment de la signature est détectable ».

Au niveau Européen, l’effet juridique et la recevabilité d’une signature électronique comme preuve en justice ne peuvent être refusés au seul motif que cette signature est se présente sous une forme électronique ou qu’elle ne satisfait aux exigences de la signature électronique qualifié[22].

v Au niveau national.

      Au niveau national, plusieurs législations ont déjà renforcé leur arsenal législatif, des lois qui reconnaissent la force probante à la signature électronique ont été adoptées par les Etats.

En France, c’est la loi n°230 du 13 mars 2000 qui est venue modifier le droit français relatif à la preuve, en reconnaissant l’équivalence sur support papier et du support numérique dès lors qu’un certain nombre de conditions sont respectées. Dans ce contexte, l’article 4 de cette loi précise que « lorsqu’elle est électronique, elle consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache ».  A ce niveau, le procédé de la signature électronique simple n'est pas présumé fiable mais l’écrit signé ainsi sous forme électronique ne pourra être refusé en justice au titre de preuve dès lors que le procédé permet d’identifier le signataire et de garantir le lien avec l’acte signé. Le même article précise également que « la fiabilité d’un procédé de signature électronique est présumée jusqu’à preuve contraire lorsque ce procédé met en œuvre une signature électronique sécurisée, établie grâce à un dispositif sécurisée de création de signature électronique et que la vérification de cette signature repose sur l’utilisation d’un certificat électronique qualifiée »

Pour bénéficier de la présomption de fiabilité, la signature devra donc mettre en œuvre une signature réunissant trois conditions[23] : la signature électronique sécurisée.  Autrement dit, il s’agit d’une signature électronique satisfaisant aux exigences édictées par l’article 1 de décret n°272-2001 du 30 mars 2001 pris pour l’application de l’article 1316-4 du code civil et relatif à la signature électronique. 

En autre, le législateur Français dans l’article 1316 a soumis l’admissibilité du document électronique en tant que preuve au même titre que l’écrit papier à une double condition. D’abord, qu’il puisse identifier celui dont il émane, ensuite que les conditions dans lesquelles il est établi et conservé en garantissant l’intégrité. L’association par l’article, de l’admissibité de de l’écrit électronique à l’existence d’un moyen permettant l’identification de son créateur, est dû au fait que la signature a pour fonction d’identifier le signataire de document électronique, on peut dire alors que cette technique de rédiger l’article était pour ouvrir la voie de la reconnaissance de la signature électronique.

De son côté, le législateur Marocain a tranché dans la question de la force probante de la signature électronique et son équivalence à la signature manuscrite. Il l’a définitivement institué cette équivalence à travers l’adoption de la loi 53-05, complétant le titre premier du livre premier de Dahir des obligations et contrats. Cette équivalence est renforcée dans la loi 43-20.

En vertu de l’article 417-4 de DOC « tout acte sur lequel est apposée une signature électronique qualifié et un horodatage électronique à la même force probante que l’acte dont la signature est légalisée et de date certaine ». Le législateur reconnait en effet, à travers cette article la validité de tout acte comportant une signature électronique sécurisée et par voie de conséquence, il reconnait la force probante de la signature électronique.

De même, avec la loi 43-20 relatif aux services de confiance dans les transactions électroniques, le législateur marocain  a institué une égalité  entre les différents niveaux de la signature électronique, en prévoyant que l’effet juridique et la recevabilité d’une signature électronique simple ou avancée ne peuvent être refusés au seul motif que cette signature se présente sous forme électronique ou qu’elle ne satisfait pas aux exigences de la signature électronique qualifié prévues dans l’article 6 de ladite loi[24]. De même, qu’il reconnaît la validité de tout acte juridique sur lequel est apposée une signature électronique qualifié et qui est horodaté[25].

Dans un arrêt du 15 décembre 2016, la cour de cassation marocaine a considéré que «  les documents électroniques ne deviennent fiables et authentiques que s’ils sont signés, par une signature électroniques sécurisé, en vertu de l’article 6 de la loi 53-05 relatif à l’échange électronique des données juridiques qui dispose que la signature électronique sécurisée, prévue par les dispositions de l’article 417-3 du DOC, doit satisfaire aux conditions suivantes : - être propre au signataire, créée par des moyens que le signataire puisse garder sous son contrôle exclusif et garantir avec l’acte auquel elle s’attache un lien tel que tout modification ultérieure dudit acte soit détectable[26] »

En outre, le législateur a encadré le certificat électronique dans des articles 10, 11 et 12 de la loi 43-20. A cet égard, il distingue entre le certificat électronique simple et le certificat électronique qualifié. Cette dernière doit être délivrée par un prestataire des services de confiance agréé et comporte les données citées par l’article 11 de ladite loi. En effet, cette autorité qui crée et délivre les certificats de la signature électronique joue un rôle majeur dans la sécurité de la signature électronique et l’échange commercial électronique en général.

Notre législateur à l’instar des législations comparées, a reconnu une valeur juridique à la certificat électronique qualifié, mais sous réserve qu’elle satisfait aux exigences de l’article 11 de la loi 43-20. Dans cette perspective, le législateur a rendu responsable, le titulaire du certificat électronique, pour ce qui concerne la confidentialité et l’intégrité des données afférentes à la création de la signature électronique qu’il utilise. En cas de doute quant au maintien de la confidentialité des données ou de perte de conformité à la réalité des informations contenues dans le certificat, le titulaire doit procéder à la révocation de cette dernière[27].

En revanche, le législateur Marocain, comme son homologue Algérien[28] a reconnu la valeur juridique des certificats délivrés par un prestataire de services de certification électronique, établi dans un pays étranger à condition que le certificat ou le prestataire des service de certification électronique  soit reconnu dans le cadre d’un accord multilatéral auquel le Maroc (ou L’Algérie) est partie ou d’un accord bilatéral de reconnaissance réciproque entre le Maroc et le pays d’établissement du prestataire[29].

De ce qui précède, on peut remarquer que les différentes législations évoquées ci-dessus ont traité la question de la reconnaissance des certificats électroniques étrangers, sans parler de la signature électronique étrangère contrairement à la loi-type de la CNUDCI sur les signatures électroniques. A notre avis, cela constitue une lacune législative que ces législateurs doivent corriger, car la plupart des transactions électroniques contiennent un élément étranger parmi ses parties. C’est la raison pour laquelle, les signatures électroniques étrangères doivent avoir la même valeur que celles qui sont établies dans l’un de ces pays.  


Conclusion

    Au final, il est certain que la reconnaissance de la recevabilité de la signature électronique comme celle de l’écrit électronique constitue une avancée appréciable, mais insuffisante. Consacré la recevabilité d’un écrit qui comporte une signature électronique revient à déclarer celui-ci admissible à titre de preuve en ce sens que le juge ne peut l’écarter en considération de sa seule nature informatique. En tout cas, nous devons convaincre le juge d’accorder à pareil document une force probante égale à celle d’un écrit sur support papier. A cet effet, il revient à celui qui produit en justice un document assorti d’une signature électronique de démontrer la fiabilité de ce type de preuve. Une telle preuve est redoutable et soumise à l’appréciation du juge qui l’accueillera en fonctions cas d’espèce et de son attitude à l’égard des nouvelles technologies.

       Il convient de noter que le législateur Marocain prenne nettement position sur les formes de signature électroniques auxquelles il confère la même force probante que cette attribué à la signature manuscrite. Autant, le législateur se doit d’être neutre sur le terrain sur le terrain de la recevabilité, pour permettre au juge d’accueillir et d’apprécier tout procédé de signature, autant il convient qu’il opère des choix technologiques précis à l’heure de se prononcer sur la force probante puisqu’il s’agit alors, précisément, de dispenser le juge de semblable appréciation.

 

Bibliographie :

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§  محمد سعيد احمد إسماعيل، أساليب الحماية القانونية للتجارة الالكترونية – دراسة مقارنة-، ط 1 , منشورات الحلبي الحقوقية، بيروت، ص 270.

§  لزهر بن سعيد، النظام القانوني لعقود التجارة الالكترونية، دار هومة للطباعة والنشر والتوزيع، الجزائر 2012, ص 159.

§  عبد العزيز سمية، " التوقيع الالكتروني وسيلة حديثة للإثبات – دراسة مقارنة " مجلة معارف للعلوم القانونية، العدد 17 ديسمبر 2014 ص183-184

§  أباهة فاطمة " شهادة التصديق الالكتروني كألية لضمان حجية المعاملات الالكترونية في ضوء القانون رقم 15-04 المتعلق بالتوقيع والتصديق الالكترونيين الجزائري" مجلة البحوث في الحقوق والعلوم السياسية، العدد 02، جامعة ابن خلدون / تيارت

§  W. Fares, signature électronique : sécurité des données, Revue du droit Marocain n°7, 2009, p. 36.

§  D. GOBERT, E. MONTERO, « la signature dans les contrats et les paiements électronique ; l’approche fonctionnelle ». Article publié au DA/OR avril 2000, n°53, pp. 77 à 39.

§  Ph. LE TOURNEAU, Contrats informatiques et électroniques, 2016/2017, 9éme éd. Dalloz 2016 n°412.47, p. 434.

§  M. Vivant, « Guide pratique, 4062- la reconnaissance juridique des signatures électroniques », le Lamy droit numérique 2016.



[3] La loi de la CNUDCI et le guide pour l’incorporation de la loi type de la CNUDCI sur les signatures électroniques.

[4] Directive Européenne n° 1999/93/ CE de parlement et du conseil du 13 déc. 1999 sur un cadre communautaire pour les signatures électroniques, Art.2.

[5] Article 1 de la loi égyptienne n°15/2004 relative à la signature électronique.

[6] Article 2 de la loi Algerian n°15-04 du 1er février 2015 fixant les règles générales relatives à la signature et à la certification électroniques.   

[7] Article 1316-4 du code civil français.

[8] Article 8 de la loi 53-05 relative à l’échange électronique des données juridiques.

[9] L’article 2 de ladite loi « une signature qui se manifeste par l’utilisation d’une méthode fiable d’identification électronique qui garantit que la signature est liée à l’acte qui y est lié et exprime le consentement du signataire ».

[11] Ce procédé appelé « la dactyloscopie » qui est l’étude des empreintes digitales permettent d’identifier un individu. Cette technique est utilisée essentiellement en anthropométrie judiciaire et en génétique.

[12] Examen de la rétine par ombre portée de la pupille.

[13] Ce procédé technique est habituellement employé pour le contrôle d’accès physique, ainsi que pour le pointage horaire, notamment dans certaines administrations. 

[14]  محمد سعيد احمد إسماعيل، أساليب الحماية القانونية للتجارة الالكترونية – دراسة مقارنة-، ط 1 , منشورات الحلبي الحقوقية، بيروت، ص 270.

[15]  لزهر بن سعيد، النظام القانوني لعقود التجارة الالكترونية، دار هومة للطباعة والنشر والتوزيع، الجزائر 2012, ص 159.

[16] Rapport du Groupe de travail sur le commerce électronique sur les travaux de sa trente et unième session, CNUDCI. Trentième session Vienne, 12-30 mai 1997 (New York, 18-28 février 1997).

[18] Ph. LE TOURNEAU, Contrats informatiques et électroniques, 2016/2017, 9éme éd. Dalloz 2016 n°412.47, p. 434.

[20] Cass. Civ., 1ere civ., 6 avril 2016, n°15-10.732.

[21] M. Vivant, « Guide pratique, 4062- la reconnaissance juridique des signatures électroniques », le Lamy droit numérique 2016.

[22] Article 25 le Règlement n°910/2014 du parlement européen et du conseil du 24 juillet 2014 sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur.

[23]  - Être propre au signataire

    - être crée par des moyens que le signataire puisse garder sous son contrôle exclusif.

      - Garantie avec l’acte auquel elle s’attache, un lien tel que toute modification ultérieure de l’acte soit     

        détectable. 

[24] Article 7 de projet de loi 43-20 relatif aux services de confiance dans les transactions électroniques.

[25] Article 417-3 de DOC modifié par la loi 43-20.

[26] Arrêt de la cour de cassation marocaine n°513/1, dossier commercial n °1340/3/1/2014 en date de 15 décembre 2016. 

[27] Article 41 de la même loi.

[28] Article 63 de la loi Algérien fixant des règles générales relatives à la signature et à la certification électroniques « les certificats électroniques délivrés par un prestataire de services de certification électronique établi dans un pays étranger ont la même valeur que ceux délivrés par un prestataire de services de certification électronique établi en Algérie, à condition que ce prestataire étranger agisse dans le cadre d’une convention de reconnaissance mutuelle conclue par l’autorité »

انظر، أباهة فاطمة " شهادة التصديق الالكتروني كألية لضمان حجية المعاملات الالكترونية في ضوء القانون رقم 15-04 المتعلق بالتوقيع والتصديق الالكترونيين الجزائري" مجلة البحوث في الحقوق والعلوم السياسية، العدد 02، جامعة ابن خلدون / تيارت.

[29] Article 36 alinéa 1 de la loi 43-20 


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